jeudi 1 mars 2007

BRASIL.Carnaval 101

De retour en un morceau (physiquement parlant) du Carnaval d’Olinda où la notion d’intimité a pris un tout autre sens à mes yeux. D’abord, la traversée de 36 heures d’autobus et le constat, dès la première minute après le départ, que j'ai oublié mes écouteurs... Non!!!!! Adieu les 324 chansons soigneusement choisies. Puis vient la nuit cauchemardesque durant laquelle on se dispute sans cesse l'accoudoir avec son voisin de siège à coup de gros soupirs. Par contre, au réveil, tous les passagers souriants ont l’impression de se connaître un peu mieux, comme si on avait survécu solidairement à une catastrophe. Cette fraternité m’a même empêchée de me retrouver seule au beau milieu du Sertão (l’intérieur désertique de la région du Nordeste brésilien) alors que l’autobus est parti sans moi (évidemment !) après une pause toilette. Tout l’autobus s’est mobilisé pour que le chauffeur rebrousse chemin et j’ai eu le droit à un accueil triomphal à mon entrée dans l’autobus, une sérénade en l'honneur d'une genevièverie évitée de justesse. Je me suis sentie tellement appréciée tout d'un coup. Bordellement soulagée surtout. J’imaginais déjà ma vie à cultiver les terres arides du village où je me trouvais prisonnière, marier le plus beau gars du coin et faire 9 enfants. Après avoir traversé deux saisons en passant de « l’hiver » du Pará à l’été de Pernambuco, des vaches grasses aux vaches maigres, des torrents aux nids de rivières asséchés, j’arrive enfin à Olinda où je suis accueillie à la maison de França, poète avec un grand P et ami de longue date. Plus que jamais, l’intimité est mise à l’épreuve : sa nouvelle maison (que l’on voit en entier sur la photo) est composée d’une chambre qui tient lieu de cuisine/salon/chambre à coucher, puis d’une toilette…à aire ouverte. J’oubliais le petit lit séparé par un mur qui servait de refuge pour l’hôte qui voyait sa maison agréablement envahie. Arrivent mes 2 amies de Salvador, Maria Isabel et Lang, qui viennent également profiter de l’aimable hospitalité de França. Dans l’esprit carnavalesque du « dort qui peut », on a vite appris l’art du laisser-aller alors que toute tentative de contrôle est vaine. Véritablement vaine. Bon, quelques jours de plage pré-carnaval pour faire le plein d'énergie... Commence le carnaval. Une semaine entière où je me croyais dans un film de Kusturica avec la fanfare qui te suit jour et nuit avec les 2 mêmes mélodies. Une petite accalmie de quelques heures à l’aube, puis dès le matin, c’est reparti! Nous avons eu la chance de profiter de 2 carnavals simultanés, la ville de Recife se trouvant à quelques kilomètres d'Olinda (on voit sur la photo la ville de Recife au loin qui paraît un monstre vue depuis le petit oasis vert qu'est Olinda). Deux carnavals complètement différents : à Recife, ce sont les spectacles des plus grands artistes brésiliens, les défilés de maracatú et de frevo, les familles, les enfants...bref, très smooth. Olinda, qu'un mot : la débauche. C'est la folie au premier degré, nuit et jour comme on peut voir brièvement sur les vidéos. La version nocturne est filmée lors de la meilleure nuit du Carnaval (en fait, le carnaval est alors officiellement terminé ailleurs au Brésil...pas à Olinda!) C'est le défilé des bois (boï-z), ces boeufs mythiques sortis des légendes rurales qui défilent dans les rues, chacun appartenant à son "bloco", c'est-à-dire n'importe quel groupe avec un peu de volonté et d'imagination. Ils défilent devant cette vieille femme qui, déçue d'habiter une rue où les fanfares ne passaient point, a décidé de fabriquer un petit trophé à chaque bloco qui passe devant chez elle. À leur passage, elle leur offre quelques fruits et de petits shooters de cachaça (alcool national), mais surtout, elle leur donne sa bénédiction. Elle s'est transformée en une véritable légende vivante avec tous ces blocos qui font la file devant sa maison en attente de sa bénédiction. C'est devenu une tradition. On peut apercevoir dans la vidéo nocturne la dame attentive qui se fait courtiser par un bloco. Dans le contexte Recife et Olinda, les copines et moi avons donc adapté notre accoutrement selon le degré d'intensité projeté de la folia : sur les photos, on voit la version soirée tranquille et la version "noite de locura"... Et voici le fameux forró, cet air typique du Nordeste que j'adore danser dans les fins de soirées, bien qu'au Québec, nos hommes soient plutôt réticents à s'y mettre (sauf notre cher Neal qui s'y prête chaque fois que je lui demande...je t'adore). On voit ici un accordéniste aveugle à l'oeuvre ...(saudade intense de mon accordéon)... Malheureusement, la fête à son apogée s'est terminée pour moi lorsqu'une grosse grippe m'a fixée au hamac pour quelques jours. Eh bien, ma fièvre m'a quand même amené son lot de délires hallucinatoires alors que les copains se préparaient à sortir... Pour conclure l'aventure carnavalesque et reprendre des forces, on opte pour une sortie sur le littoral sud loin de la ville. D'ailleurs, c'était assez symbolique comme expérience. 7 ans après avoir foulé cette plage lors de notre périple de 350 km à marche sur le littoral brésilien de Recife à Maceio, Maria et moi nous retrouvions ensemble sur ce même morceau de sable... Seulement, au lieu de la solitude zen d'autrefois, on se trouvait avec uma galera totalmente doida (traduction: une gang de malade) qui surfait et se jetait dans des vagues dangereusement énormes. Je m'y suis risquée, moi-même, mais je dois dire que j'ai compris le principe de la noyade. Affamés le soir venu, nous sommes invités chez Zé qui insiste pour nous faire griller sur la braise un poisson appelé Xereu . Impossible de refuser quoi que ce soit à cet hyperactif qui a même grimper l'arbre de sa cour pour nous décroché quelques cocos à boire pour la route de retour. Ce petit vidéo démontre quand même que les normes d'hygiène sont relatives (personne n'a été malade). En attendant le poisson, un petit jam pernambucano s'imposait... Bon voilà, j'ai essayé d'être concise malgré la présentation chaotique (à l'image de mon séjour), mais vraiment, je suis en état de retenue pour ne pas faire ma touriste cassante qui étale toute ses photos et son blabla. Tout ce que je peux ajouter, c'est que j'ai eu ma première poussée de dents de sagesse en plein carnaval... Serait-ce l'influence des longues conversations avec mes deux soul sisters ou plutôt le signal que, cumulant l'Espagne et le Brésil trois fois, j'en arrive à un certain degré de maturité dans mes états festifs? Méditation...

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Genevieve!!!
Quel beau voyage! Incroyable comme expérience. Cela donne le goût de tout laisser tomber ici et d'y aller! Patience...
L'Argentine est ta prochaine destination? Tu fais toujours de la capoeira? En tout cas, une vraie beauté au flamenco.

ciao xoxo